La Haye – Cour permanente d’arbitrage : L’État face à des réclamations de Rs 450M

  • Le Pr Christian Doutremepuich et Antoine Doutremepuich cherchent réparation pour l’annulation d’un projet de laboratoire privé d’analyses génétiques et ADN annulé par le gouvernement Lepep

Les débats dans le cadre d’un arbitrage initié par le Professeur Christian Doutremepuich et Antoine Doutremepuich contre la République de Maurice ont été enclenchés au siège de la Cour permanente d’arbitrage (CPA) au Palais de la Paix, à La Haye, aux Pays-Bas, il y a deux semaines. Cette procédure arbitrale est menée conformément au Règlement d’arbitrage de la Commission des Nations unies pour le droit commercial international de 1976 (Règlement CNUDCI), au Règlement de la CNUDCI sur la transparence dans l’arbitrage entre investisseurs et États fondé sur des traités de 2014 (Règlement CNUDCI sur la transparence), et à la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de Maurice sur la protection des investissements de 1973. Pour l’heure, Maurice a soulevé des points liés aux exceptions d’incompétences du Tribunal d’arbitrage portant sur cette réclamation de plus de Rs 450 millions pour l’abandon du projet de laboratoire privé d’analyses génétiques et ADN.

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La partie mauricienne est représentée dans cet arbitrage par la firme Lalive avec le Deputy Solicitor-General Rajeshsharma Ramloll, faisant lui aussi le déplacement pour suivre les débats. Pour l’heure, Maurice récuse cet arbitrage, affirmant qu’il n’y a pas eu « des investissements à Maurice tels quels » entourant ce projet. La Presiding Arbitrator nommée pour ce litige est la Professeure Maxi Scherer, assistée par les Professeurs Olivier Caprasse et Jan Paulsson. Les investisseurs français, le Professeur Christian Doutremepuich et Antoine Doutremepuich prétendent dans ce cas qu’il y a eu violation des droits matériels par le Traité bilatéral d’investissement franco mauricien par la République de Maurice. Ils affirment que Maurice a manqué à son obligation de traitement juste et équitable dans la mesure où, après avoir accepté, encouragé et accompagné le développement du projet, elle y a mis fi n d’une façon totalement arbitraire. Selon eux, l’Economic Development Board, en remplacement au Board of Investment, a le 9 février 2018, formulé « without prejudice » les termes et conditions en vertu desquels les autorités mauriciennes pourraient considérer une réclamation des Français concernant l’indemnisation des dépenses effectivement engagées pour le développement du projet, soit un montant de 467 000 00 euros. Les Doutre-mepuich déplorent toutefois que les autorités mauriciennes aient refusé d’examiner les préjudices en termes de gains manqués.

En effet, le Professeur Christian Doutremepuich affirme avoir été sollicité depuis 2009 par les autorités mauriciennes pour réaliser des expertises médico-légales. Ainsi, voulant étendre ses activités, et sur la base d’échanges préliminaires avec les autorités mauriciennes, le Professeur a entrepris d’établir à Maurice un laboratoire privé d’analyses génétiques et ADN. Selon lui, au cours de l’année 2013, le projet a été soumis pour la première fois au Board of Investment, sous la tutelle du ministère des Finances ayant en charge la promotion et l’accueil des investisseurs étrangers à Maurice. Ce projet comportait deux volets : le premier concernait le marché d’expertise judiciaire et visait à proposer, en vue d’assister dans des affaires pénales et civiles, des services d’expertises médicolégales aux autorités judiciaires mauriciennes et d’autres pays de l’océan Indien et de l’Afrique. Le second concernait le marché en plein essor des tests de paternité sur Internet, ce service devant être potentiellement accessible dans le monde entier. Par la suite, le Professeur Doutremepuich déclare qu’une lettre en date du 14 octobre 2014, du bureau du Premier ministre de Maurice, a exprimé de manière inconditionnelle sa non-objection à la réalisation du projet.

Après les élections de décembre 2014

Il soutient cette thèse en déposant une lettre à l’adresse du BOI : « This Office has consulted different stakeholders, including the Forensic Science Laboratory and the Office of the Solicitor-General on the above proposal submitted by Prof. Doutremepuich in regard to the above project. Following views received, I am to inform you that we have no objection to the project. You may liaise with Prof. Doutremepuich accordingly ».

Le Professeur Doutremepuich souligne qu’à cette date le Prime Minister’s Office, sous l’ère du Parti travailliste, était pleinement informé de la nature du projet par le BOI et avait pu prendre connaissance depuis juin 2014 du “Business Plan”. Et de souligner que le ministère de l’Environnement, également sollicité par le BOI, avait aussi émis un avis de nonobjection au projet. L’investisseur soutient que sur la base de la lettre de non-objection du bureau du Premier ministre qui leur avait été communiquée par le BOI, trois sociétés ont été constituées avec l’assistance de son conseil local, la société ABAX. La mise en œuvre de ce projet de laboratoire privé d’analyses génétiques et ADN comprenait également la recherche d’un terrain. Le Professeur Christian Doutremepuiche et Antoine Doutremepuich auraient effectué de nombreuses démarches et de nombreux voyages pour trouver les terrains et locaux appropriés. Un terrain situé à Réduit-Highlands a, dans un premier temps, été envisagé sur proposition de la State Land Development Company.

Après les élections de la fin de l’année 2014 et l’éviction de son CEO, la State Land Development Company n’a plus donné suite au projet et Christian et Antoine Doutremepuich se sont donc reportés sur un terrain situé à Rose-Belle Business Park. La société Water Research Co Ltd avait également été sollicitée pour des études de sol en vue de la construction du laboratoire et les plans du bâtiment à construire ont été réalisés. Les investisseurs affirment également que le BOI soutenait la réalisation du projet, notamment en encourageant un partenariat avec l’Université de Maurice. Les Doutremepuich affirment que jusqu’au premier trimestre de 2016, ils n’avaient pas de raison de douter de la mise en œuvre du projet et étaient en attente de l’autorisation des autorités mauriciennes pour l’acquisition du terrain en application de la Non Citizen Property Restrictions Act. Les investisseurs affirment avoir appris le 14 avril 2016 – soit un an et demi après la première lettre d’approbation sans réserve du bureau du Premier Ministre, après avoir sollicité et étudié un Business Plan actualisé -, le rejet du projet « sans aucune motivation ». Ils affirment que des demandes de clarifications ont été adressées au PMO et au ministère des Finances, mais en vain.

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