Echiquier politique — Réforme électorale : obstacle quasi insurmontable

Gros embarras de Lakwizinn avec le prima face case de Contempt of Assembly déclaré du DPP contre l’ex-PPS Kalyan Tarolah dans la Lalangate

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A prévoir les salaires de Rs 323 000 de Vijaya Samputh, détail qui avait choqué Pravind Jugnath en avril 2017, devraient remonter à la surface avec une séance d’interrogatoire Under Warning Long Overdue

Tractations au sein de la Task Force sur le timing de la convocation de Me Raouf Gulbul, l’un des rares seniors members at the Bar avec une menace de disbarment dans le rapport Rotin Bazar

A 54 semaines de la dissolution automatique de l’Assemblée nationale, le gouvernement Piti/Papa de Pravind Jugnauth avait mis en place une stratégie politique avec le projet de réforme du système électoral et les corollaires du Declaration of Assets Bill et du Financing of Political Parties Bill. Mais Lakwizinn du Prime Minister’s Office bute contre un obstacle quasi insurmontable pour recueillir les 52 votes au Constitution (Electoral Reform) (Amendment) Bill. En marge du coup de vent de l’entorse à la démocratie, découlant du report des élections villageoises de décembre de cette année à juin 2020 au plus tard, l’Hôtel du gouvernement a été asséné d’un autre coup de massue politique: la Speaker de l’Assemblée nationale Maya Hanoomanjee entraînée, malgré elle, dans une controverse portant sur des obscénités. L’ancien Private Parliamentary Secretary et député du MMM du No 10 (Montagne-Blanche/GRSE), Kalyan Tarolah, est épinglé dans un prima facie case de Contempt of Assembly, relevé  par l’Office of the Director of Public Prosecutions (DPP) dans l’enquête sur la Lalangate, avec la transmission de photos et de messages obscènes et indécents sur des téléphones cellulaires à partir de l’Assemblée nationale. Néanmoins, à l’horizon de la fin de cette année se profilent d’autres Laké Ferblan, entre autres la Vijaya Samputh Saga avec ses salaires de Rs 323 000 par mois en tant que Chief Executive du Trust Fund for Specialised Medical Fund, ayant choqué le Premier ministre, Pravind Jugnauth, la prochaine convocation de l’ancien Chairman de la Gambling Regulatory Authority, Me Raouf Gulbul, dans le sillage des enquêtes initiées sous la supervision de la Task Force sur le rapport de la commission d’enquête Lam Shang Leen. Il y a encore une épée de Damoclès sur la tête du ministre des Services financiers, Sudhir Sesungkur, pour un éventuel délit allégué d’agression physique sur un photographe lors d’un mariage dans sa circonscription.

Dans la conjoncture politique, Lakwizinn du PMO a voulu jouer à quitte ou double avec le projet crucial de la réforme du système électoral, dont la présentation en première lecture, mardi, du Constitution (Electoral Reform) (Amendment) Bill. Le Leader of the House sait pertinemment bien que sa majorité est bien éloignée de la barre des 52 votes requis au terme de la Constitution pour le projet d’un Parlement d’un maximum de 85 membres, soit 63 élus sous le système de First Past The Post, 12 sous la représentation proportionnelle et un maximum de dix pour les Additional Seats en guise de substitut au Best Loser System. Les autres volets confirmés de la réforme concernent la Gender Representation avec au moins une candidate sur trois pour les investitures des partis dans les 20 circonscriptions et la même proportion pour la liste des proportionnelles aussi bien que des mesures pour lutter contre le transfugisme.

Valeur du jour, la réforme électorale avec l’élimination du Best Loser System est vouée à l’échec à l’Assemblée nationale. Le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, interrogé par Week-End, hier matin, a fait une virulente sortie contre la démarche politique de Pravind Jugnauth. “Ce sera sans issue. Je ne crois pas que les députés du Parti travailliste voteront en faveur de ces amendements à la Constitiution. En tout cas, il n’en est nullement question pour le PMSD. Ce projet de loi est bon pour la poubelle dans le sens littéral du terme et je me demande si, symboliquement, je ne devrai pas déchirer ce texte de loi et le jeter à la poubelle lors de mon intervention au Parlement”, souligne-t-il.

“C’est l’une des plus grosses conneries politiques. Ce texte de loi prévoit 22 parlementaires additionnels. D’où sortiront les fonds pour leurs allocations parlementaires chaque mois ? De notre poche évidemment. 22 nouveaux parlementaires à se battre pour des postes de ministre ou à lorgner des missions officielles à l’étranger. C’est de l’anti-proportionnel”, s’appesantit le leader du PMSD en revenant sur “ses préoccupations par rapport au redécoupage des circonscriptions, au recensement et aux inégalités dans le système électoral”.

Sauf que le projet de loi sur la réforme du système électoral sera présenté en première lecture par le Premier ministre, mardi prochain et aucune indication du calendrier des débats n’a été révélée. Evidemment, étant donné que ces amendements sont de nature constitutionnelle, le gouvernement ne peut avoir recours au procédé de Certificate of Urgency, d’où le renvoi des débats à une autre séance.

Mais quand ? Difficile à dire. Des sources à l’Hôtel du gouvernement avancent que les débats pourraient se dérouler jeudi et vendredi prochains en se fondant sur les délibérations du Conseil des ministres de vendredi. Par contre, dans d’autres milieux aussi avisés, l’on n’écarte pas la possibilité que la présentation en deuxième lecture de la réforme n’interviendra que le lundi 10 et le mardi 11 décembre. Ce sursis pourrait être mis à profit pour tenter d’élaborer des possibilités de “Bidging the Gap” entre les différents bords politiques, même si les battlelines ont déjà été dressées à ce sujet.

“Un gros grain de sel”

What’s next ? Cette question prend toute son importance devant l’obstacle insurmontable des 52 votes à franchir à l’Assemblée nationale. “Faute de mieux, il devra y avoir un Plan B. Il faudra avoir recours à la formule des Transitional Constitutional Measures en vue de respecter le Pronouncement du Comité des Droits de l’Homme des Nations unies comme ce fut le cas pour les élections de décembre 2014”, supputent des observateurs au sujet de ce cul-de-sac politique tout en regrettant que la source du problème réside dans la voie adoptée pour aborder ce problème.

“Le germe de ce dilemme politique est qu’au lendemain des élections du 10 décembre 2014, Lalyans Lepep, dans sa sagesse, a institué un comité ministériel pour se pencher sur la réforme électorale. Logiquement, et avec de meilleures chances d’arriver à un compromis sur un sujet aussi délicat, l’option idéale aurait dû être un Select Committee of the House. Toutefois, aveuglé par le rapport des forces issues des urnes du 10 décembre 2014, Lalyans Lepep n’avait pas anticipé la cassure de décembre 2016 du PMSD avec sa majorité fondant comme neige au soleil en dépit du soutien des transfuges”, avance-t-on dans ces mêmes milieux avec la réforme en suspens.

Toutefois Lakwizinn du PMO, qui s’évertue de vendre la thèse que “le gouvernement, avec cette série de projets de loi, ne fait qu’honorer ses engagements et ses promesses à l’électorat”, a encore été pris de court par des événements politiques. Vendredi, c’est l’Office of the Director of Public Prosecutions qui a ajouté “un gros grain de sel” au menu politique de l’Hôtel du gouvernement. Depuis tôt, ce vendredi matin, la nouvelle courait que l’Office du DPP allait annoncer sa décision sur les findings de l’enquête du Central CID initiée contre l’ex-PPS, Kalyan Tarolah.

La coïncidence a voulu que la teneur du communiqué sur PMP 3442/18 et OB 972/17 du Central CID allait être du domaine public une heure avant le point de presse du Premier ministre sur le calendrier de la réforme pour la fin de l’année. Qu’importe la campagne menée par des Top Chefs de Lakwizinn niant qu’un Prima Facie Case de Contempt of National Assembly a été établi, comme rapporté dans l’édition du Mauricien d’hier matin, le 18 paragraphe à la page 3 du communiqué officiel en fait foi.

“Therefore, our Office (the Office of the Director of Public Prosecution is of the considered view that a Prima Facie Case of contempt of the National Assembly has ben disclosed by the enquiry. Unfortunately, as matters stand, a prosecution for such a contempt cannot be advised by us for procedural reasons”, note le DPP, Me Satyajit Boolell, Senior Counsel, en faisant allusion à l’immunité conférée aux parlementaires sous les Standing Orders.
L’autorité pour initier des procédures sous le Standing Order 74 pour des “offences provided for in the National Assembly (Privileges, Immunities and Powers” revient à la Speaker de l’Assemblée nationale, Maya Hanoomanjee. Pour faciliter la tâche des autorités compétentes, le DPP, qui avait déjà égratigné le Central CID selon lequel, “there has been no suggestion of prosecution by the police”, décrypte le Standing Order 74 (1) au sujet de la Privilege Complaint par le truchement d’un Written Notice à la Speaker. “It is then up to the Speaker, and the Speaker alone, to decide whether the complaint does amount to a contempt of the Assembly and where she does, she will refer the matter to the DPP.  And where she does not find that the complaint discloses an offence under the National Assembly (Privileges, Immunities and Powers) Act then that is the end of the matter (Standing Order 74(5))”, souligne de DPP.

Des political collateral damages extrêmement compromettants
Définitivement, l’embarras sera encore plus gros dans le camp du gouvernement, d’autant plus que le DPP a pris le soin de recadrer l’infraction imputée à Kalyan Tarolah sous la section 6 (1) (i) de la National Assembly (Privileges, Immunities and Powers) Act. “Our Office takes the view that the sending of obscene and indecent messages and photos on a mobile phone while being in the House at a time when it was in session amounts to misbehaving in a disrespectful, indecorous and improper manner.  Those acts do bring serious disrepute to our august National Assembly and shows a total lack of decorum and respect by the Honourable Member concerned”, dit le DPP, qui concède que ces échanges se déroulant le 11 avril 2017 se faisaient entre adultes consentants.

De par les réactions, enregistrées hier matin de Lakwizinn, il est évident que l’os de Lalangate de Kalyan Tarolah s’avère indigeste politiquement avec l’opposition parlementaire et également la population suivant la décision de la Speaker sur le prima facie contre Tarolah avant les prochaines vacances parlementaires. Force est de constater que la série est encore loin d’être terminée. L’enquête de la Central CID sur un cas d’agression physique alléguée impliquant le ministre des Services financiers lors d’un mariage à Bel-Air n’a pas encore été classée par les Casernes centrales.

L’avis du DPP dans le cas de Sudhir Sesungkur, comme il a été le cas pour l’ex-PPS Tarolah, suscite des appréhensions à l’Hôtel du gouvernement. Sauf une clearance absolue du DPP, toute autre option pourrait générer des conséquences quant au maintien du principal concerné au sein de l’équipe gouvernementale à la veille des prochaines élections générales. Le dernier exemple en date est la démission de Showkutally Soodhun en tant que vice-Premier ministre “to clear his name” dans le procès sur des propos racistes dans l’affaire de la National Housing Development Corporation de Palma.

Les deux autres cas en suspens et qui devront rebondir d’un moment à l’autre ne devront avoir aucun bearing sur le fonctionnement du gouvernement. Attention, les political collateral damages pour le pouvoir pourraient être extrêmement compromettants. Les personnalités concernées sont des heavyweights, en l’occurrence Me Raouf Gulbul, ancien Chairman de la Gambling Regulatory Authority, et Me Vijaya Samputh, proche du ministre du Tourisme, Anil Gayan et un des dirigeants du Muvman Liberater.

Le cas du Senior Member at the Bar, qui est sous le  coup d’une mention de disbarment dans le rapport de la commission d’enquête, a été abordé en fin de semaine lors des délibérations de la Task Force, présidée par le directeur général de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC), Navin Beekarry. Des sources bien informées avancent que la décision de convoquer incessamment le Legal Adviser de Pravind Jugnauth pour interrogatoire Under Warning aurait été déjà entérinée. Subséquemment, des développements auraient eu pour effet de hold on l’audition de cette grosse pointure du Barreau.

Ces mêmes milieux affirment que “le dossier à charge contre Me Gulbul est déjà bien ficelé et que tôt ou tard ‘he will have to face the music’”. Le point qui attend d’être élucidé demeure si cette convocation sera exécutée avant le 15 janvier prochain, date à laquelle l’appel du DPP interjeté devant le Judicial Committee of the Privy Council dans l’affaire MedPoint sera entendu. Il est évident qu’en cas d’interrogatoire Under Warning, le dossier sera transmis au DPP avant toute décision comme c’est le cas pour les VVIP depuis l’affaire Goldfinger.

De son côté, Vijaya Samputh pourrait être entendue après le Warning administré aux suspects au cours de la première quinzaine de ce mois, si ce n’est même pas plus tôt. Elle sera confrontée par l’ICAC aux conclusions du Fact Finding Committee, présidé par Lutchlyparsad Aujaheb de l’Attorney General’s Office sur ses salaires de Rs 323 000 par mois en tant que Chief Executive du Trust Fund for Specialised Medical Care. Ce lièvre, qui avait été soulevé en avril 2017 par le truchement d’une Parliamentary Question du député Rajesh Bhagwan, avait révélé que les objections du Premier ministre et du ministre de la Santé, Anwar Husnoo, contre cette révision salariale, avaient été outrepassées en toute impunité pour favoriser cette proche connexion d’Anil Gayan.

En tout cas, avec une telle séquence, Lakwizinn aura à multiplier les initiatives en tous genres pour maintenir le cas sur le projet de réforme du système électoral, déjà mal barré…

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