Grève de la faim : l’inquiétude s’installe

Ce vendredi soir, Nishal Joyram, enseignant de profession, en était à son 18e jour de grève de la faim, organisée pour soutenir ses revendications en faveur d’une baisse des prix de l’essence et du diesel. Il n’avait donné aucune indication quant à son intention de mettre fin à son action.

- Publicité -

Jusqu’à le début de sa grève, devant la Cathédrale Saint-Louis, au coeur de la capitale, Nishal Joyram était un parfait anonyme. Il est vrai que dans le pays, sous la poussée des mouvements de défense des consommateurs et des partis politiques parlementaires et extraparlementaires, la contestation avait commencé à gagner du terrain pour réclamer une baisse des prix du carburant. A l’initiative de l’ACIM et de ses partenaires, des défilés de contestation avaient été organisés, notamment à Port-Louis. Cependant, il faut reconnaître que le déclenchement de la grève de la faim de Nishal Joyram a pris tout le monde de court. Comme c’est souvent le cas, les premiers jours de son action se sont déroulés dans une quasi-indifférence, d’autant que l’attention publique était fixée sur le début de la Coupe du Monde.

Un Comité de soutien, composé de personnes ayant une longue expérience dans l’organisation des mouvements de contestation, s’est alors constitué autour de lui pour le soutenir et pour assurer la coordination éventuelle avec les autorités compétentes. Graduellement, l’action de grève a intéressé l’opinion publique. Samedi dernier, cette grève avait même pris une dimension nationale, avec l’organisation d’une manifestation dans les rues de Port-Louis, qui avait mobilisé une bonne foule, avec Nishal Joyram en fauteuil roulant. Sans toutefois que les contestataires n’arrivent à amener le gouvernement et les autorités à modifier d’un iota leur position, c’est-à-dire réduire ne serait-ce que d’un sou le prix de l’essence et du diesel. Jusqu’à hier soir, les tentatives de dialoguer avec le gouvernement se sont heurtées à un mur de silence, sans réussir à ouvrir les moindres négociations.

Cette fois, le mouvement de solidarité à Nishal Joyram a pris une plus grande ampleur, avec un soutien plus élargi, venant notamment des représentants de différentes religions, à commencer par l’évêque de Maurice, Sténio André, qui a exprimé sa solidarité à une cause juste pour le bien-être de toute la population.

L’aya Soundarajen Maestry et le pandit Anil Mohabeer estimaient que Nishal Joyram fait son devoir de citoyen et ont salué l’envoi d’un message fort au gouvernement. Cependant, il apparaît comme de plus en plus évident que plus que l’objectif de revendication du gréviste de la faim, c’est son état de santé qui attise actuellement la plus grande compassion. À l’évidence, l’inquiétude gagne du terrain, alors que sa santé commence à se détériorer.

La grève de la faim est une action ultime lancée lorsque toutes les avenues en vue de trouver une solution à des problèmes sont fermées. On sait qu’elle a été pratiquée par des personnalités mondialement connues, comme le Mahatma Gandhi, dans la lutte en faveur de l’indépendance de l’Inde. À Maurice, tout un chacun a apporté un soutien nuancé, même s’ils affichent ouvertement leur solidarité. Paul Bérenger, qui a participé à des actions de grève dans le passé, rappelle qu’une telle action se prépare minutieusement, et qu’il faut avoir une cause juste et un objectif clair.

Arvin Boolell, lui, ne cache pas son inquiétude devant la gravité de la situation, et a lancé un appel pour que le gréviste mette fin à son action. Pour la première fois depuis le début de la grève, un membre du gouvernement, Renganaden Padayachy, a dit être « sensible à toutes les douleurs ». Avant de lancer un appel à Nishal Joyram : « En tant que Mauricien et patriote, je lance un appel pour lui dire que nous sommes sensibles à sa santé. Je lui demande d’arrêter sa grève de la faim. En tant que gouvernement responsable, nous prendrons des décisions appropriées pour la population. Ce gouvernement n’a pas hésité lorsque le besoin s’en est fait sentir. »

Des appels de ce genre vont commencer à se faire entendre. Certes, sa cause est juste, et il a réussi à alerter tout le pays, non seulement sur le prix des produits pétroliers, mais également sur l’intransigeance du gouvernement. Mais Nishal Joyram doit savoir que la vie est ce que l’homme a de plus précieux et de plus sacré. Personne n’a le droit de lui retirer. Il est donc de son devoir de protéger sa vie.

Jean Marc Poché

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -