Le pèlerinage à Grand-Bassin de cette année a débuté sur une mauvaise note suivant le choc et l’émoi suscités par l’effroyable drame du dimanche 3 mars où six jeunes dévots de Triolet, qui venaient d’entamer leur marche au Ganga Talao, ont trouvé une mort des plus cruelles après l’incendie de leur kanwar à Arsenal. La thèse de l’électrocution accidentelle est privilégiée, selon la police.
Afin de minimiser les risques d’électrocution, le Central Electricity Board a entrepris des travaux pour la sécurité des pèlerins à Plaine-Sophie et aux environs de Ganga Talao. Les lignes de haute et moyenne tension ont été placées en retrait de la route, à 8,2 et 8,5 mètres, soit au-delà de la norme requise. Des amendes sévères sont prévues sous la CEB Act de 2005 pour les personnes manipulant les câbles électriques, soit jusqu’à Rs 100 000 et une peine d’emprisonnement jusqu’à cinq ans.
Pour atténuer les risques d’accident, le comité ministériel présidé par le ministre des Arts et du Patrimoine culturel, Avinash Teeluck, en collaboration avec les associations socioculturelles et la Traffic Branch de la police, a soumis une série de recommandations le 31 janvier 2024 pour prévenir les accidents. Il avait été conseillé aux pèlerins de construire des kanwars, ne dépassant trois mètres de haut et deux mètres de large pour éviter de toucher les lignes à haute tension du réseau du CEB et faciliter le passage des kanwars sous les passerelles et les auto-ponts. Les dévots doivent aussi s’abstenir d’utiliser les générateurs d’essence car les risques d’explosion sont conséquents.
Toutefois, des jeunes ont refusé de se plier à ces recommandations et diffusent de la musique électro à fond la caisse tout au long du parcours menant à Grand-Bassin et sur le chemin de retour. Les pèlerins du Nord et du Sud, notamment de Goodlands, Bel-Air, de Caroline et d’Anse-la-Raie sont déjà sur le chemin de retour et se préparent déjà aux rites dans le cadre du Chaar Pahar ke Puja qui aura lieu dans la soirée de vendredi.
Une grande affluence est notée à Grand-Bassin et la route à La- Marie et La-Brasserie reste embouteillée. La police a conseillé aux automobilistes du Sud d’emprunter la nouvelle route La-Vigie-La Marie où l’on note toutefois un gros embouteillage à cause du trafic venant des Plaines-Wilhems. La route a été élargie et les structures en béton construites à l’époque coloniale pour canaliser l’eau ont été démolies tout près du réservoir.
Ceux qui avaient l’habitude de se procurer des légumes frais aux environs du réservoir doivent maintenant se tourner vers d’autres sources.
À Grand-Bassin, les berges du lac sont inondées et les pompiers sont à pied d’œuvre pour évacuer le superflu d’eau afin de permettre aux dévots d’offrir des prières et placer leurs offrandes sur les structures en béton. Les escaliers menant vers le lac sont devenus glissants et la plus grande prudence est recommandée, surtout aux personnes âgées. Le service de nettoyage tourne à plein régime.
Plusieurs officiers de la National Coast Guard sont prêts à intervenir en cas d’accident. En raison des pluies diluviennes de ces derniers temps, des précautions doivent être prises afin que les enfants et les personnes âgées évitent de s’aventurer au bord du lac et de franchir le cordon de sécurité. Un poste médical, placé sous la responsabilité du personnel médical de l’hôpital Jawaharlal Nehru, assure des soins aux pèlerins. Comme les années précédentes, plusieurs organisations socioculturelles dont la Voice of Hindu, la Mauritius Sanatan Dharma Temples Federation, la Hindu House, le Human Service Trust, le Hindutva Movement sont à pied d’œuvre pour offrir des repas gratuitement aux pèlerins. Les dévots se sont rendus en grand nombre au Somnath Mandir, le parc spirituel construit par la Hindu House et où les fidèles peuvent déverser de l’eau sacrée sur le shivling de grande taille entouré de dix autres shivlings.
Les dévots peuvent faire retentir les cloches se trouvant sur deux niveaux.
Des pèlerins de l’Inde et d’Afrique du Sud ainsi que des touristes ont parcouru les différents temples et ont été impressionnés par la statue géante de 108 pieds de Mangal Mahadev et celle de Durga Maa à l’entrée Nord du lac sacré. Il convient de souligner que la Hindu House a invité le swami Kailaspuri Mahakaal Babaji de Varanasi que les dévots peuvent rencontrer au Somnath Mandir à Grand-Bassin.
La grande question sur toutes les lèvres à Grand-Bassin est de savoir s’il faut légiférer ou pas la dimension des kanwars. Les avis sont partagés, d’où la nécessité d’une table ronde regroupant les membres du gouvernement et les organisations socioculturelles pour se pencher sur la question.
Le Premier ministre Pravind Jugnauth s’est rendu à Grand-Bassin lundi et mardi et a été accueilli par les pèlerins. Le dimanche 3 mars juste avant le drame, il a donné le coup d’envoi des célébrations officielles organisées par la Hindu Maha Sabha. Les autres programmes culturels ont été annulés par la suite. Plusieurs organisations socioculturelles ont érigé des salles vertes à Grand-Bassin et sur les routes pour l’accueil des pèlerins.
La municipalité de Quatre-Bornes accueille depuis plus de 20 ans les pèlerins du Nord du pays sur le chemin du retour. Le maire de cette ville, Dooshiant Ramluckun, a assuré que toutes les facilités sont mises à la disposition de ces fidèles. C’est le dernier point de ravitaillement pour les dévots car il n’y a pas de point d’accueil sur l’autoroute et le dernier demeure la Hindu House à Cassis. Quelque 800 policiers sont de service à Grand-Bassin.
Le parcours des pèlerins a été divisé en plusieurs zones placées sous la supervision d’un haut gradé de la police. Les autorités policières, qui s’attendent à voir un maximum de pèlerins jeudi, soit à la veille de la fête Maha Shivaratree, ont pris des mesures additionnelles en vue de rendre plus fluide le flot des pèlerins et des véhicules.
Toutefois, sur la route de Ganga Talao, la ferveur, la piété ou encore l’enthousiasme des pèlerins du Maha Shivaratree n’ont été entamés…