Périls jeunes

Rien ne va plus en ce qui concerne la réhabilitation des ados à problèmes. Et cela ne date pas d’hier. Depuis plusieurs années en effet, qu’ils soient des officiers affectés dans ces centres ou des porte-parole de ces gosses, tous abondent dans le même sens : rien ne va plus ! Pourquoi ? Peut-être parce qu’il n’y a, en fait, jamais eu de réelle politique de réhabilitation à l’intention de ces ados. Parce que tout est fait, au fur et à mesure, au petit bonheur… Alors qu’il s’agit là d’un sujet épineux et qui mérite un traitement très sérieux.

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Nos jeunes, qui se retrouvent pour différentes raisons dans des centres et structures de redressement, tels les Rehabilitation Youth Centres (RYC) et Correctional Youth Centres (CYC), reviennent régulièrement sous les feux des projecteurs dès qu’un incident défraie la chronique. Bien entendu, ces incidents font presque toujours état des « mauvais comportements » de ceux concernés, de leurs frasques, caprices, agressions et manquements aux règles… Bref, tout ce qui est négatif par rapport à ces gosses. Car il s’agit en effet d’ados, de Mauriciens de moins de 18 ans et, dans certains cas, même d’enfants de 8 ou 10 ans. Des bambins qui, pour une raison ou une autre, ont flirté avec des dangers divers tels que le vol de bijoux, d’argent ou de portables, qui ont vendu de la drogue, synthétique ou dure, entre autres larcins commis. Des gamins donc coupables d’avoir enfreint des lois et qui échappent au contrôle de leurs parents et qui, ainsi, sont placés dans ces structures de redressement.

Le dernier incident en date a été évoqué lors de la séance parlementaire du 24 avril par un député de l’opposition, à savoir le mauve Veda Baloomoody. Le cas des deux mineurs enfermés nus dans leurs cellules n’a évidemment pas manqué de susciter un tollé un peu partout. Les représentants, et non des moindres, de la National Human Rights Commission (NHRC) sont descendus sur le terrain. Idem pour l’Ombudsperson for the Children. Histoire d’enquêter, de constater de visu ce qui s’y passe. Et de soumettre des rapports, sertis de recommandations sur ce qu’ils auront trouvé dans le but d’assainir la situation, parce qu’il y va de la vie de ces gosses.
Des enfants, oui, mais surtout de potentiels délinquants et truands qui, s’ils ne sont pas pris en charge à temps, encadrés et accompagnés adéquatement, reproduiront les travers qui ont été jusqu’ici leurs seuls repères. Et c’est justement là que tout foire. Et cela, ce n’est pas nous qui le disons, mais clairement les rapports successifs et innombrables d’instances comme la NHRC et le bureau de l’Ombudsperson for the Children ! Cependant, en amont, depuis plus d’une décennie, rien de concret à l’horizon !

Comme si la vie et l’avenir de ces enfants, qui font partie de la population et qui seront les citoyens de demain, étaient quantité négligeable. Qu’ils ne valent pas grand-chose aux yeux des politiques, tous régimes confondus. Un peu comme sont traités les victimes des accidents de la route et leurs proches, actuellement : qu’ils meurent écrasés ou qu’ils survivent handicapés, l’État ne s’inquiète pas vraiment de leur sort et ne compte pas sévir contre ceux trouvés coupables de cette situation, que « si bizin » !

Ni Rita Venkatasawmy, ardent défenseur de la cause des enfants, actuelle Ombudsperson for the Children, ni Me Hervé Lassémillante, Deputy Chairperson de la National Preventive Mechanism Division (NPMD) de la NHRC, diront le contraire : le combat pour une politique de réhabilitation de ces enfants, selon un programme élaboré pour répondre aux besoins spécifiques de ces jeunes, qui peuvent devenir comme les autres, moyennant qu’ils soient bien encadrés et pris en charge, ne se fait que trop attendre. Jusqu’à quand ? Quand ces gosses opteront finalement pour une action qui s’apparentera à une mutinerie ? Quand il y aura mort d’hommes ?

Pourquoi le sort de ces enfants n’intéresse-t-il aucun gouvernement ? Parce qu’ils ne représentent pas un poids électoral ? Sont-ils donc condamnés d’office ? C’est le sentiment qui perdure quand on réalise que cela fait presque une décennie que les observateurs de la question serinent, à chaque dysfonctionnement – que cela vienne des officiers, mal préparés pour ce job, ou de jeunes détenus – qu’il est plus que temps de revoir la politique de réhabilitation de ces gosses !

Une politique s’appuyant sur des activités ludiques et thérapeutiques, soutenue par des professionnels et basée sur des programmes ayant fait leurs preuves. Autant qu’on s’en souvienne, au temps où il était ministre de la Sécurité sociale, Sam Lauthan avait présenté un document en ce sens. Le remettre à jour, mais surtout le mettre en application avec le soutien de gens de calibres, et non pas des amateurs, serait un début ! Et dans le même souffle, offrir une formation évolutive aux gardiens de ces centres.
Aussi, et surtout, insuffler un capital d’amour dans la vie de ces jeunes. Parce qu’ils sont des humains avant tout. Pire, de jeunes créatures brisées, abîmées. Et ça, il semble que beaucoup l’ont hélas oublié…

Husna Ramjanally

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